La céramique de Mashiko est au coeur d’un renouveau de la poterie populaire japonaise initiée par le théoricien de l’art Yanagi Muneyoshi (1889-1961) qui découvre et s’éprend dans les années 1930 d’une modeste théière en tout point similaire, dans sa forme et dans ses motifs, à celle présentée ici. Depuis les années 1920, Yanagi constitue autour de lui un réseau d’artisans qui prendra bientôt le nom de Mouvement des arts populaires, dit également Mouvement Mingei. Parmi les artisans du groupe, l’un des plus célèbres, Hamada Shoji (1894-1978), installe son atelier à Mashiko et redonne vie à l’activité potière moribonde du village. Pour son travail de préservation de l’artisanat régional, Hamada est consacré trésor national vivant par le gouvernement japonais en 1955, date à laquelle notre théière entre en possession du MEG. Cette théière est intéressante à plusieurs égards. Premièrement, elle incarne un goût esthétique japonais majeur du milieu du XXe siècle pour l’artisanat populaire. Deuxièmement, elle est l’émissaire matériel d’une volonté japonaise de présenter cette esthétique à la Suisse en faisant cadeau du lot dans lequel s’intègre la théière. En 1955, le Musée d’ethnographie de Genève consacre d’ailleurs une petite exposition au lot, intitulée « Céramique rustique japonaise et genevoise ». Enfin, il est intéressant de relever qu’en échange du cadeau, la ville de Genève adresse au Japon un lot égal de céramiques populaires de Colovrex, témoignant de la sorte d’un fructueux échange culturel et scientifique entre les deux pays.