Pury, Laurent de (Ebolowa/Cameroun, 1958)

Si certains artistes ont recours à de multiples médiums, Laurent de Pury s'exprime presque exclusivement par le bois (parfois mêlé à du bambou, de l'osier ou du rotin) – son enfance au Cameroun joue sans doute un rôle prépondérant. Pour les romantiques, l'artiste révélait des vérités cachées, ici l'artiste, plus simplement, crée des « observations provoquées », un état de contemplation active dans laquelle il prolonge et accompagne les formes déjà présentes, parfois de manière embryonnaire, dans la nature. Ensuite, comme un jardinier, qui dirige, modèle et forme à l'aide de tuteurs ou réalise des greffes et des boutures, Laurent de Pury dessine dans l'espace des structures, d'apparence légère et souvent verticales, qui semblent irrémédiablement poussées vers le haut par une sève encore présente. L'artiste est guidé par les notions de « mémoire, de permanence et de respiration infinie » que lui suggère l'environnement végétal. Il en résulte des formes simples à la géométrie savamment dosée, qui rappellent la nature sans l'imiter, en cultivant un léger et poétique décalage, qui n'est pas sans rappeler l'épure et la mise en valeur des matériaux propres à l'esthétique japonaise. Malgré son unité du matériau (bois), la sculpture « sans titre » mélange néanmoins deux essences de bois, chêne et sapin, pour créer une sorte de ruban de Moebius. D'aspect léger, elle délimite un espace en creux en son centre et elle tient en équilibre sans socle ni support – une caractéristique du travail de l'artiste ; elle peut être placée dans différentes positions, sur différents « côtés », comme un organisme végétal s'adaptant à son environnement.
Yves Christen