Gianni Motti manie, avec ironie, l'art de l'appropriation et du détournement, il dévoile les absurdités et les travers d'un monde contemporain politisé, policé et médiatique et, de par ses actions ou de leurs traces, il se détache du milieu proprement artistique, lié à l'exposition. L'objet artistique – la revendication d'un tremblement de terre, la présence de Motti lors d'une convention des droits de l'homme de l'ONU à Genève où il occupe le siège indonésien vacant, sa présentation comme candidat aux élections américaines – questionne dès lors la notion de l'auteur et la situation sociologique de l'artiste, notamment dans son rapport aux enjeux économiques et à la valeur symbolique de son statut.
Ce dollar ici un peu froissé est un objet qui se vend en galerie, réalisé en bronze peint à la main, unique dans sa numérotation, mais édité à 15 exemplaires différents ; il s'agit d'un objet commun devenu précieux, un objet produit en quantité démesurée mais artisanal, fait main, un objet banalisé à l'allégorie souvent peu reluisante, lourdement emblématique. Gianni Motti révèle par là-même, derrière la représentation stéréotypée de cet objet, toute sa valeur paradoxale et ses traits antithétiques.
Stéphane Cecconi