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Wildi Merino, Ingrid (Santiago de Chile/Chili, 1963)


Quelquepart I, 2001
Installation vidéo
Vidéo Digital HD, Master Beta Digital, couleur, son
Dimensions : 3.5 x 4.7 m (dimension de la projection); Durée : 9'33'' (en boucle)
Acquis en 2021

[n° inv 2021-056]

Collection du Fonds d'art contemporain de la Ville de Genève (FMAC)



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Crédits photographiques : Ingrid Wildi Merino, Santiago de Chile
 

Ingrid Wildi Merino qualifie ses œuvres d'« essai-vidéos », c'est-à-dire qu'elles se situent entre le documentaire et la fiction, et qu'elles tirent parti des deux genres pour mettre en perspective le réel. L'artiste conduit généralement des entretiens filmés avec des gens ordinaires, puis réalise un travail de montage ciselé. Elle va souvent alterner des fragments tirés de ces entretiens pour brouiller la cohérence de la narration et laisser l'imagination du public travailler. Sur le plan formel, ses films sont simples, sans maniérismes. Cette sobriété affirme le caractère objectif des témoignages, alors que les récits font l'objet d'une manipulation.
Si certains films partent de sa propre histoire et dépeignent les réalités quotidiennes du Chili, que l'artiste a quitté pour la Suisse, pays d'origine de son père, en 1981 pour des raisons politiques, d'autres portent sur des sujets qui ne la concernent pas directement mais qui traitent de problématiques relatives à sa condition de déracinée, telles la mémoire et l'appartenance culturelle, comme dans ces œuvres du début des années 2000. Dans "Si c'est elle", trois hommes, filmés sur un fond blanc, se remémorent une femme qu'ils ont connue. La mise en commun de leurs commentaires – les entretiens ne sont pas restitués de manière linéaire – fait progressivement apparaître un profil peu cohérent. Alors que l'on pense qu'ils parlent de la même personne, le film se clôt sur l'énonciation de trois noms différents. Cette issue nous permet de réaliser que nous brodons sans cesse à partir d'éléments réels. Dans "Quelquepart I", les anecdotes de projectionnistes filmés en plan rapproché sur leur lieu de travail sont transmises par bribes et intercalées les unes aux autres, avec pour bruit de fond le cliquetis d'une pellicule en train de défiler. On entend parfois également les questions posées par Ingrid Wildi Merino. Les projectionnistes évoquent leur métier et par ce biais la notion de fiction, la réception des films par le public et la suspension de crédulité. Leurs propos se concentrent peu à peu sur la mort à l'écran : bien que mise en scène, elle suscite diverses réactions chez le public qui peut autant regarder des images d'une grand cruauté, conscient du fait qu'elles sont factices, que pleurer d'émotion en admettant ce qu'il voit. La cabine de projection est un lieu en retrait, d'où poser un regard objectif sur le film en cours de diffusion, tandis que la salle de cinéma nous assujettit à l'illusion de la fiction. Enfin, dans "Kontinuum I", deux germanophones et deux francophones de la région du Mittelland décrivent chacun·e un objet important à leurs yeux, tout en le manipulant. On perçoit dans leurs gestes la dimension affective de leur relation à cet objet. La progression narrative opérée par le montage va de la description de la fonction de l'objet – souvent détournée de celle usuelle – et de sa fabrication – souvent artisanale – au passage du temps et à la transmission. "Kontinuum I" est une collaboration avec Mauricio Gajardo, à l'occasion du pavillon "Heimat Fabrik" à Morat, dans le cadre d'Expo.02.

Laurence Schmidlin