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Lewis, Mark (Hamilton, Ontario/Canada, 1958)


Upside Down Touch of Evil, 1997
Film
Film 35 mm transféré sur vidéo Betacam, NTSC, noir et blanc, stéréo
Durée : 4'41''
Acquis en 2000

[n° inv 2000-026]

Collection du Fonds d'art contemporain de la Ville de Genève (FMAC)



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"Upside Down Touch of Evil" est un remake de la célèbre scène d'ouverture de "Touch of Evil" d'Orson Welles (1958). Cette scène, réputée dans l'histoire du cinéma, est constituée d'un unique plan séquence. Elle commence par un gros plan sur une bombe tenue par un individu, qui en actionne la minuterie et la dépose dans le coffre d'une voiture. Un couple monte dans celle-ci. La caméra, fixée sur une grue, s'élève et suit la voiture, qui roule dans les rues d'une petite bourgade à la frontière américano-mexicaine. Elle se focalise sur la voiture, jusqu'à l'apparition, après un peu plus d'une minute de plan séquence, d'un couple interprété par Charlton Heston et Janet Leigh. La caméra suit désormais simultanément le couple et la voiture, qui avancent dans la même direction. Après le passage d'un poste frontière, la voiture sort du champ. Charlton Heston et Janet Leigh s'embrassent, mais s'interrompent subitement du fait du bruit d'une explosion. Ils regardent au loin ; le plan séquence se termine et un contrechamp montre la voiture en feu retombant au sol.
Le remake de Mark Lewis est fidèle à la scène d'Orson Welles, à deux éléments près. Premièrement, "Upside Down Touch of Evil" est un film quasiment muet, seul le son de l'explosion finale se faisant entendre. Deuxièmement surtout, le film, comme son nom l'indique, est à l'envers : il montre les personnages la tête en bas. Il y a probablement chez Mark Lewis exercice de style, voire démonstration de force. L'artiste souhaite reproduire la virtuosité d'Orson Welles. Il rappelle ainsi que l'histoire du cinéma est autant l'histoire d'un art que celle d'une compétition technique, et surtout que cette technique s'acquiert. Toutefois, en renversant l'image, en la mettant sens dessus dessous, Mark Lewis conteste cette technicité. À la recherche d'un autre langage cinématographique, qu'il ne parviendra à développer que dans des films subséquents (voir par exemple "Queensway : Pan and Zoom" (2005)), Mark Lewis, dans "Upside Down Touch of Evil", n'en est qu'au stade de la décomposition structurelle du cinéma. Bien que le plan séquence intéresse Mark Lewis - la plupart de ses films seront constitués d'un seul plan séquence -, la narration est un élément cinématographique dont il se démarquera au fil du temps. Dans "Upside Down Touch of Evil", il manifeste, d'un même geste, son intérêt pour le plan séquence et son refus de la narration : l'action étant montrée à l'envers, la trame narrative du remake de "Touch of Evil" est indéchiffrable pour le spectateur qui ne connaît pas la scène d'Orson Welles. Finalement, à l'opposé de ce qui se produit dans le film original, où Charlton Heston et Janet Leigh interrompent leur baiser lors de l'explosion, les amants de Mark Lewis continuent à s'embrasser malgré la déflagration, ignorant le sensationnel au cinéma.

Hamid Taieb