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Julier, Pauline (Genève/Suisse, 1981)
Postec, Clément (Finistère/France, 1986)


Follow The Water, 2023
Installation vidéo trois canaux
Vidéo numérique 4K, trois canaux, couleur, son 5.1
Durée : 51'
Acquis en 2023

[n° inv 2023-032]

Collection du Fonds d'art contemporain de la Ville de Genève (FMAC)



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Ce qui lie les œuvres de Pauline Julier entre elles, ce sont à la fois des questions récurrentes sur la relation occidentale entre la culture et la nature, les multiples figures impensées d'hybridation entre l'humain et le non-humain et une articulation bien particulière entre la recherche et la production de formes. On pourrait dire que l'ensemble de son travail s'organise par ricochet, les œuvres développant les unes avec les autres un genre de résonance qui permet de constamment relancer son processus de recherche et de développer toujours plus précisément son travail entre l'anthropologie, la science ou la poésie. Ce sont donc moins les sujets sur lesquels Pauline Julier se concentre que la méthodologie utilisée dans chacun de ses projets qui la caractérise comme artiste chercheuse. Cette attitude se retrouve très concrètement dans le processus de montage des œuvres "Cercate Ortensia" et "Follow the Water".
Profitant d'une invitation de la Biennale des arts médiatiques de Santiago du Chili, Pauline Julier entreprend une visite des observatoires astronomiques du désert d'Atacama. Lors de ce voyage, elle découvre d'immenses mines d'extraction de lithium qui seront le point de départ de sa recherche aboutissant à "Follow the Water". Le lithium, ce minerai indispensable à la confection des batteries et autres outils de communication et de stockage, est aussi un composant important des antidépresseurs. Ainsi, son utilité ne se résume pas à nos besoins croissants de technologie mais également à la stabilisation de nos affects. À partir de cette trame narrative, l'artiste poursuit ses réflexions sur les rapports entre la nature et la culture, entre une situation écologique et une technoscience qui se détache de plus en plus de la réalité terrestre. En écho aux témoignages des techniciens de la mine ou de médecins, elle donne la parole à une résidente de San Pedro de Atacama qui décrit comment les techniques ancestrales de la gestion des eaux permettent de cultiver la terre dans ce désert parmi les plus arides au monde. On y découvre aussi les dégâts causés par les stratégies politiques régulant l'usage de l'eau sur ce territoire, qui fonctionnent encore selon un mode colonial et extractiviste sans laisser de place à d'autres modèles d'existence ; une politique en totale contradiction entre les besoins de la nature et des populations, et l'exigence de profit. Pauline Julier accentue encore ce sentiment de déconnexion avec la réalité terrestre en nous faisant découvrir que ce même désert sert de terrain de préparation aux campagnes d'exploration de la planète Mars. Cette zone géographique devient alors pour l'artiste l'expression la plus vive de notre fuite en avant contemporaine et de notre incapacité ou notre refus de prendre la mesure de la catastrophe écologique en cours.

Catherine Pavlovic