Objet 48 : 3

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Tête sur une embase conique (sciée)
République du Congo, cuvette du Congo, rivière Kuyu
Kuyu. 19e siècle ou début du 20e siècle
Bois polychrome (alstonia congensis?). H 28 cm
Don du peintre et collectionneur Émile Chambon en 1981
MEG Inv. ETHAF 044393

Notice

De nombreux atypiques et pièces tardives mis à part, un corpus de 300 pièces kuyu répertorié en 1989 se répartit selon des critères de formes en trois styles. Contrairement au dernier, le plus nombreux, toujours en production, et qui comprend à la fois des pièces kuyu et mbochi, le style I, archaïque, limité à 40 têtes bustes et statuettes est spécifiquement kuyu. Longtemps méconnu, il commence à inspirer les faussaires.

Cette tête ancienne en présente toutes les caractéristiques. La coiffe épouse la forme du crâne avec des alvéoles pour enraciner des boucles de fibres ou de cheveux. Des demi-cercles concentriques soulignent deux boutons chéloïdes sur les tempes à hauteur des yeux ; deux autres se situent très haut sur la nuque rasée. L’agencement des motifs sur le front est particulier, comme sur chaque pièce du style, à partir d’une gamme restreinte de formes toujours identiques. La bouche lippue aux lèvres rabattues, contraste avec la dentition réduite à une grille espacée. Quant aux traces de pigments noirs, blancs, rouges et ocre, ils rappellent que les objets kuyu étaient non seulement très scarifiés mais aussi très colorés.

Le collier figurant des cauris que ferment des « griffes de panthère » est le modèle majoritaire du style I, l’autre modèle pour les têtes imitant un collier de métal. Sous ce collier, une gorge permettait d’attacher la robe de fibre qui dissimulait le porteur de l’objet. L’embase en forme de cône a été sciée ici au tiers.
Sur le terrain en 1984, selon le témoignage d’un vieux chef kuyu, des têtes semblables nommées etata, étaient autrefois portées par des dignitaires pour annoncer la fin d’une cérémonie importante.

Toutes les têtes kuyu ont le même agencement – tête, collier, gorge, embase – mais l’embase du style I est percée en son centre pour accueillir un bâton qui rehausse la pièce. Ce pourquoi elle est dite « femelle » par opposition aux marottes du style III dont un long manche prolonge la tête.
Les sculptures anthropomorphes du styles I qui appartenaient aux couches les plus anciennes de l’identité kuyu, ont disparu en un siècle de la mémoire des autochtones en même temps que les sociétés secrètes qui en faisaient usage. Celles-ci ont réorganisé les initiations dans des sociétés de danse qui n’utilisent plus que les marottes de kébé kébé du style III.

Anne-Marie Bénézech

Bibliographie


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